Cet article d'Amélie Charnay paru en janvier 2007 sur le site01men — généraliste culturel —, décrit assez bien la vie d'un livre. Même si les chiffres avancés ont évolué, les marchés se sont tendus, les délais raccourcis, le shéma conducteur est le même. "Du manuscrit au pilon", voilà bien annoncé le cycle d'une majorité de titres. Même si chaque auteur donne le maximum de lui-même dans son œuvre, les réalités du marché en font déchanter plus d'un.
Vous trouverez des liens vers deux autres articles issus du Point et de l'express. De 2005 à 2008, les chiffres diffèrent, la triste réalité reste. Pour certains, le livre est avant tout une marchandise avec ses frais de stockage, son éphémérité commerciale, son renouvellement méditiaque, la concurrence,… des notions très éloignées de la "création littéraire" et de "l'exception culturelle française"!
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| Au commencement était le manuscrit. Envoyé à quelques éditeurs, il rejoint la plupart du temps la pile des retours. Mais pour les quelques heureux élus qui sont sélectionnés, le plus dur reste encore à venir. Une chance sur mille d'être édité« Nous recevons huit mille à dix mille manuscrits par an et nous n'en publions que deux en moyenne. Certaines années pas du tout », précise-t-on chez Albin Michel. Des statistiques qui ont de quoi effrayer les écrivains en herbe mais qui sont à relativiser selon Marc Autret, auteur de 150 questions sur l'édition : « On dit parfois qu'un jeune auteur n'a guère plus d'une chance sur mille d'être remarqué par un gros éditeur de fiction, mais les chiffres tombent à des taux moins désespérants chez les moyens et surtout chez les petits éditeurs, seuls véritables défricheurs. » Et les situations diffèrent fortement suivant le genre : un ouvrage technique aura ainsi plus de chance de trouver preneur qu'un roman. Une fois sorti de presse, le livre n'a pas encore gagné la partie : il doit trouver grâce aux yeux des représentants et des libraires. Relégué dans un cartonTiré à un nombre d'exemplaires variable (de 3 000 pour le roman d'un inconnu à 1,8 million pour un Harry Potter), un livre n'est pas assuré d'être distribué dans toute la France ni de se retrouver dans les rayonnages d'une Fnac. Tout dépend de son réseau de diffusion. Quand bien même ce dernier est conséquent, le livre peut se retrouver noyé au milieu de nombreuses nouveautés. C'est à l'éditeur de convaincre les représentants de son potentiel afin qu'ils incitent les libraires à le mettre en avant. Le libraire est ensuite seul maître à bord dans sa boutique. Il peut ainsi très bien ne pas exposer à la vente les livres qu'il a achetés. « Il arrive souvent qu'ils n'ouvrent même pas les cartons des livres qu'ils reçoivent ! », s'insurge Gérard Pouradier, journaliste et fondateur de l'Association pour le contrôle de la diffusion du livre. Une pratique qui n'a rien de honteux pour Sophie Saint-Marc, du Syndicat de la librairie française : « Les libraires ne peuvent lire préalablement tout ce qu'ils commandent. Et les ouvrages reçus ne correspondent pas toujours à ce qu'ils attendent donc ils les écartent. Sans compter que les libraires des 2e et 3e niveau [petits points de vente, NDLR], ne savent pas ce qu'ils vont recevoir puisqu'ils ne disposent pour faire leur choix que d'une grille sans titres d'ouvrages, avec juste la collection et la nature de la vente. » Un phénomène qui prend particulièrement de l'ampleur lors des rentrées littéraire de septembre et janvier. Trois semaines pour obtenir un succèsEnfin en place dans les rayons des librairies, l'ouvrage attend avec impatience le client qui s'attendrira sur son sort. Gare au temps qui passe : s'il ne parvient pas à séduire le chaland en quelques semaines, il risque vite d'être mis au rebut par le libraire. « Il est difficile de déterminer la durée de vie moyenne d'un livre. Ce qui est sûr, c'est que son temps de décollage est de plus en plus court. On sait si c'est un succès au bout de 3 à 5 semaines. Au-delà, le libraire aura tendance à le mettre dans un coin », précise le rédacteur en chef adjoint de Livres Hebdo, Fabrice Piault. Une mise de côté au bout de quatre semaines ne signifie pas pour autant la mort du livre à qui on accorde encore généralement deux mois de sursis dans la boutique. Mais le couperet peut aussi tomber plus vite. Grâce à la politique des retours, le libraire a le droit de se faire rembourser les invendus par l'éditeur. En théorie, il est censé attendre trois mois avant de renvoyer ses exemplaires. « En pratique, beaucoup d'éditeurs sont plus souples et acceptent les retours avant les trois mois », précise Sophie Saint-Marc. Encore tabou il y a une dizaine d'années, ce retour précoce des ouvrages est désormais assumé au grand jour par l'ensemble des acteurs du marché. 20 % des livres pilonnés ?Le Syndicat national de l'édition estime que le nombre d'invendus tournerait autour de 100 millions d'exemplaires chaque année en France, pour une production d'environ 500 millions d'exemplaires. Pour Fabrice Piault, « ces chiffres recouvrent des situations très variables. La littérature générale représente environ 35 % d'invendus, le parascolaire 50 % parce qu'il est vite daté. Mais la moyenne générale n'est pas si mal, c'est moins qu'il y a vingt ans et beaucoup moins que dans la presse où il y a 50 % d'invendus ! » Une efficacité que la chaîne du livre aurait gagnée grâce à l'informatisation et à une politique de flux tendus. Reste que peu de perspectives s'ouvrent à un livre invendu : repartir au stock, être racheté par son auteur, donné à une association caritative ou partir au pilon. « On peut dire que les 2/3 au moins des invendus vont au pilon parce que stocker un livre coûte cher, que les auteurs ne rachètent en général qu'une dizaine d'exemplaires et que les dons de livres sont un épiphénomène », explique Christian Robin, maître de conférence à Paris XIII et auteur du Livre et l'édition. Vécu comme un traumatisme par les auteurs qui n'en sont pas toujours avertis, le pilon suscite de moins en moins la polémique car il est désormais considéré comme un moyen d'assainir le marché. Avec comme consolation de savoir que le livre ne meurt pas tout à fait : recyclé en papier, il peut alors donner vie à un nouvel ouvrage ! |
En 2005, parraissait l'article :
Voyage au bout du pilon par Marianne Payot sur le site de l'Express.
Il commençait ainsi :
Chaque année en France, environ 100 millions d'ouvrages sont invendus. Que deviennent-ils? Si les beaux livres peuvent bénéficier d'une seconde chance, la plupart connaissent un sort beaucoup moins enviable... et finissent en papier recyclé. L'Express lève le voile sur l'un des sujets les plus tabous du monde de l'édition...
La suite sur le site de l'express
Plus près de nous, en juillet 2008, c'était lePoint qui abordait le sujet…
Le grand cimetière des livres par Karine Papillaud
Il commençait ainsi :
Un livre ne meurt jamais, nous dit-on... Faux ! Pour laisser la place aux 676 livres qui feront la rentrée littéraire, un grand ménage s'impose. Visite dans ce haut lieu des basses oeuvres de l'édition. Pilon, fais ton office !
La suite de l'article sur le site du Point
Le pilon en chiffres
Les pilons sur retour représentent 50 millions d'exemplaires, par rapport aux 520 millions d'exemplaires envoyés aux librairies chaque année. 20 % de ce volume, c'est-à-dire 105 millions d'exemplaires, sont retournés par les libraires aux éditeurs. Les pilons sur stock représentent 30 millions d'exemplaires, soit 4 % du stock détenu par les distributeurs éditeurs et points de vente.