Bonjour Richard
Je viens de terminer ton livre, La trace.
Je ne sais pas pourquoi, ou du moins, je feins de ne pas le savoir, j'ai envie de t'insulter, de t'incendier.
Imposteur, roublard, tu m'as eu!
Ne jette pas de suite ce courrier, attends la suite...
Samedi matin, hier, le facteur m'apporte ton livre. Non, pour être précis, l'apporte à Corinne, chroniqueuse de MIX, lorsque nous partions faire quelques emplêtes au centre village. Tu vois, je me l'étais déjà approprié.
Mêlée au courrier, l'enveloppe fut entrouverte sur une simple remarque "super, le livre de Richard...", rien ne prédisait ce qui allait suivre.
Après une sieste méritée par ces chaleurs estivales, j'ai commencé sa lecture. Le plaisir du week end dernier passé ensemble à Sablet avait excité ma curiosité.
D'abord charmé par la finesse asiatique que dégageait ton récit, j'ai avalé d'un trait les 100 premières pages, envahi sans m'y attendre par le sentiment jouissif que j'aurais du mal à quitter ce livre. Mais, voulant offir un peu de temps à mon épouse, temps le plus souvent partagé au travail, je me forçais à le refermer.
Le lendemain, dimanche, après une matinée outillée pour quelque besogne matérielle, l'envie de replonger dans ton univers a écourté ma sieste, c'est un comble!
Cette fois-ci, ton voyage me semblait long. Etait-ce la chaleur, je trouvais le style sans grâce. Je décidais de me rafraîchir dans l'eau du bassin mis à chauffer sous l'astre brûlant, évitant soigneusement de mouiller les pages. Le temps passait agréablement, savourant le contraste provoqué par l'image du "President executive manager" de chez Chanel et cette aventure japonaise vue à travers le regard bleu de ce voyageur des seventies aux boucles dorées.
L'heure était à la légèreté, le transport, ce livre me dépaysait, certe, mais, le meilleur était à venir.
Vint la deuxième lettre (pour ceux qui ne l'ont pas lu, c'est une première lettre que reçoit le narrateur qui déclenche toute l'intrigue du roman).
Pris par l'émotion, ma peau se frippait comme si le temps était passé à vive allure..., non, c'était l'eau du bassin.
Je quittais l'endroit pour m'aérer sous la tonnelle, passage du courant d'air, il était déjà cinq heures, mais le soleil chauffait encore.
C'est à partir de ce moment que j'ai quitté ce qui se passait autour de moi. Je crois même que j'ai rabroué Corinne, essayant de me détourner dans son aventure Iranienne avec Nahal Tajadod au risque de me faire perdre le fil de cette tragédie born in Japan.
Oui, Richard, c'est bien là que tu m'as eu.
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Je venais de passer du Guide du routard à Roméo et Juliette, de La balade des gens heureux à L'homme à la moto ou Avec le temps sans y prendre garde.
Si je peux me permettre, excuse-moi par avance : "Mon salaud, tu m'as bien eu!", mais le respect dû à l'émotion m'en empêche...
Je reprendrai simplement ton premier mot : imposteur!
Je pensais avoir commencé un livre flash back post adolescent, et c'est une tragédie chargée d'émotion et d'éternité, comme l'est ce Japon que tu décrits, comme le sont les sentiments partagés par ces personnages intemporels, qui m'a bouleversée.
C'est sûrement moins tendance que la jet set ou les apitoiments égocentriques d'un quadra parisien..., mais, aux cœurs d'enfants le bouleversement éternel des amours impossibles, aux autres les paillettes des sentiments superficiels et éphémères.
Il était 19 heures, j'ai refermé ton livre, avalé jusqu'à "Tokyo, avril 2006"
Richard, je te remercie infiniment de ton imposture, ce week-end fut très bon. Si beaucoup pensent te connaître, comme un Japonais tu sais cacher ta nature profonde et ce livre permet de gratter un peu, juste un peu.
Dans un courrier récent, tu abordais la magie de l'écriture qui fait durer l'instant et rapproche les gens.
Il me semble tellement te connaître aujourd'hui.
Toute mon amitié
Dominique
P.S : je regrette seulment que ton éditeur n'aie pas mieux imagé l'enveloppe sur la couverture de ton livre. Je n'y retrouve pas la finesse et l'émotion qui s'en dégagent. On dirait une simple enveloppe industrielle de chez "JPG" ou "Vicking", mais pas cette missive aux feuilles d'érables en filigrane, écrite à l'encre rouille.
J'ai reçu ta photo de la couverture version japonaise... rien à voir, quelle finesse ces Japonais!
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Paru chez : Le seuil en mai 2007 - ISBN 978.2.02094779.4
Dans le silence de la lecture, quelque soit l'endroit,
la magie des mots transporte le lecteur d'une façon insidieuse.
Dans les pensées invisibles, un univers prend forme,
une vie est transformée à chaque fois qu'une page est tournée.